La Louvière : La caméra embarquée, mouchard redoutable !

jeudi 19 juillet 2007,

Nouvel outil pour la zone de police : une webcam, placée dans une voiture banalisée. Mais elle ne peut être utilisée qu'à titre préventif. Notion ambiguë.


Rue de Bouvy, à La Louvière, mardi 19h30. Deux voitures sont côte à côte au feu rouge. Clin d'œil désarmant d'un passager à la conductrice d'à côté. Soudain, la méprise. « Vous n'avez pas attaché votre ceinture », lui lance la dame en uniforme au volant : Rosetta Di Bella est agent à la police locale. Sa convoyeuse, Evelyne Jenard, gère la caméra numérique embarquée dans la Citroën, citadine anonyme de leasing que la police échangera dans trois mois.
A un autre carrefour, une pizzeria tout juste inaugurée a le don d'attirer des voitures ventouses sur les trottoirs, sur les passages pour piétons. « Vous gênez la circulation et vous constituez un danger pour les piétons », assène Evelyne Jenard à une clientèle soudain zélée. « Vous pouvez repasser dans deux minutes On sera bien garés. » A deux pas du Cora, la caméra filme un automobiliste qui passe à l'orange mûrissant. « Il a de la chance, soupire Rosetta Di Bella, dans son sillage. Nous ne pouvons pas lire le numéro de plaque sur les images de notre webcam Sony pour le poursuivre ensuite. »

Ce véhicule, roi des mouchards de l'unité de roulage de la police de La Louvière, sillonne deux heures par jour les rues de l'entité depuis mai 2007, sous la responsabilité du commissaire Christian Baise. « Cette année, nous avons déjà recensé quatre tués sur la zone, confie-t-il. Tous les jours, des gens se tuent, se blessent sur le chemin du travail. Nous, nous gérons les accidents, nous informons les familles des victimes Tout irait si bien si seulement les usagers de la route portaient la ceinture et respectaient le code de la route. Quand va-t-on cesser le carnage ? »

Pièce à conviction
Cette caméra embarquée est en principe d'usage strictement préventif. Comme le justifie Christian Baise : « Nous filmons le comportement incivique ou agressif d'un usager. Puis, nous l'arrêtons, le temps de lui montrer ses fautes et de lui adresser un message éducatif, citoyen, convivial, bien plus persuasif à nos yeux qu'une politique sécuritaire de PV à outrance. »

Prévenir et non réprimer. Toutefois, cette règle connaît certaines limites. « En Belgique, la preuve est libre, rappelle le commissaire. En cas de litige grave – homicide ou blessures involontaires consécutives à une infraction au code de la route –, le film, réalisé dans un cadre légal, peut constituer une preuve, que le juge du tribunal de police peut décider d'utiliser ou non pour rendre son jugement. »
Dans le véhicule, l'ordinateur de bord, couplé à la webcam, s'éteint. Batterie déchargée. Un conducteur en fait les frais, lui qui, sous les yeux des deux policières, franchit délibérément un feu rouge. La Citroën banalisée attend le feu vert puis fonce pour rattraper l'incivique. Si la caméra l'avait filmé, il aurait été impossible d'exploiter les images aux fins de lui dresser procès-verbal. Mais la caméra ayant déclaré forfait, la perspicacité des policières assermentées fait le reste. « Vous auriez pu heurter des piétons, des voitures ! » Les policières tranchent : le conducteur écope d'une amende salée.

Source : www.lesoir.be