A la caserne Delta, on attend impatiemment la relève

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La caserne se teint de rouge : un appel vient de tomber. Une ambulance se dépêche de rejoindre les personnes qui ont besoin d’assistance. Rien d’inhabituel à la caserne Delta, où les sorties comme celles-là font partie du quotidien. Situé à un endroit stratégique où cohabitent notamment autoroute et métro, le poste de Delta est le plus grand des services d’incendies du pays.

Les véhicules de service se trouvent dans le garage, en attente d’une intervention. Le sol y est quelque peu mouillé. C’est le résultat non pas d’une intervention, mais d’une blague entre pompiers : "La dernière recrue s’est fait jeter un seau d’eau sur la tête tout à l’heure", ricane Eric Labourdette. Ce dernier est affecté à la caserne Delta, où il combine sa fonction de pompier avec celle de syndicaliste. Désignant les véhicules qui sont en plutôt bon état, il assure : "Les pompiers de Bruxelles n’ont pas à se plaindre de leur matériel." Non, le problème se situe ailleurs. La caserne couvre un territoire étendu, mais ne compte que 17 hommes, dont 13 personnes sont de garde. Encore faut-il que celles-ci soient disponibles. Comme dans le reste du pays, le manque de personnel se fait fortement ressentir. A Bruxelles, il manque 100 pompiers. "La situation est urgente", insiste Eric Labourdette. Il nous emmène à l’intérieur de la caserne, où il nous montre le tableau qui affiche les tournantes des pompiers. On peut y voir que deux hommes sont affectés à plusieurs postes à la fois : la pompe, la citerne et le petit service. "Ils font le boulot réservé à deux personnes supplémentaires, pas encore engagées", explique M. Labourdette. Il désigne ensuite la centrale, qui reçoit les appels : "L’un de nous devrait être à la centrale tout le temps . Il arrive pourtant qu’il n’y ait personne." Le hic, c’est que l’absence de pompiers pourrait mener à des poursuites pénales, pour non-assistance à personne en danger. Un pompier venu nous rejoindre ajoute : "Il y a des fois où [la personne s’occupant de] l’échelle était partie et qu’on avait besoin d’elle." Les choses risquent de se compliquer davantage, souligne Eric : "Selon un arrêté royal qui sera d’application dès 2018, au moins six hommes doivent être présents dans le cas d’un incendie. Pourtant, nous ne pouvons pas en envoyer plus de quatre. On fera de nous des hors-la-loi pour quelque chose qui n’est pas de notre faute."

La caserne doit également faire face à la problématique récurrente du vieillissement de son personnel. "Malheureusement, le recrutement ne suit pas", déclare M. Labourdette. "A Bruxelles, on a un peu rajeuni le cadre professionnel, mais puisque nous sommes privés de recrutement, ce cadre-là finit par vieillir également." Les nouvelles recrues suivent une formation d’un an, dont six mois de stage professionnel où ils travaillent en gardes de 24h, sous la supervision d’un parrain expérimenté. Le temps consacré à cette formation essentielle ralentit le rythme des entrées, qui ne peut pas suivre celui des départs à la retraite.

Le pire, c’est que les nouvelles recrues n’attendent qu’à entrer. Deux pompiers de la caserne racontent que leurs fils sont sur une liste, espérant le déblocage de fonds nécessaires à leur engagement. En attendant la relève, les pompiers de Delta perdurent : "Le pompier est débrouillard", assure Eric. Que faire en cas de blocage ? "On va tout casser", plaisante l’un d’eux. Blague à part, les pompiers n’excluent pas d’autres manifestations commes celles de lundi.


Source: La Libre.be